COMMENT LA SUEDE DEVIENT UNE SOCIÉTÉ SANS PÉTROLE?
Face à la diminution des réserves d'énergies fossiles, la Suède a d'ores et déjà commencé leur substitution, avec l'objectif de réduire considérablement sa dépendance pétrolière dans les secteurs les plus consommateurs à l'horizon 2020. Son investissement dans les énergies renouvelabes pourrait placer le pays à l'avant-garde des technologies de développement durable.
Souhaitant relever le défi imposé par l'épuisement des combustibles fossiles, mais aussi réduire les émission de gaz à effet de serre engendrées par leur consommation, le gouvernement suédois a nommé en 2005 une commission pour l'indépendance pétrolière. Réunissant des chercheurs, des industriels et des fonctionnaires, elle a présenté l'année suivante une stratégie intitulée "faire de la suède une société sans pétrole"
Les objectifs affichés pour une première phase, en 2010, sont ambitieux. Fondée en grande partie sur une politique d'efficacité énergétique, le programme vise à ce que l'ensemble de la société suédoise augmente cette efficacité de 20%. Les transports étant le secteur le plus consommateur de pétrole, puisque les automobiles brûlent les deux tiers du pétrole utilisé en Suède, la consommation d'essence et de diesel devra diminuer de 40% à 50%. Par ailleurs plus aucune habitation ni immeuble commercial ne devrait avoir recours au fioul pour le chauffage. Enfin, l'industrie devra restreindre ses besoins en pétrole de 25 à 40%.
CONVERSION AU VERT
Si élevées qu'ils paraissent, ces objectifs s'inscrivent dans la continuité d'une politique qui a fait ses preuve depuis les années 1970. En trente ans, la Suède a réduit de 70% son utilisation du pétrole pour le chauffage résidentiel, en particulier grâce à l'énergie tirée de la biomasse. Le bois et les déchêts verts représentent actuellement les deux tiers des combustibles utilisés.
La politique fiscale, avec notamment l'instauration en 1991 de la taxe sur les émissions de dioxyde de carbone, a grandement favorisé la "conversion au vert" selon le gouvernement. Cette taxe a rendu le chauffage au fioul économiquement désavantageux et l'Etat poursuit à présent une politique d'incitation fiscale en attribuant un crédit d'impôt aux foyers qui acquièrent des chaudières à bois.
Par ailleurs, grâce à la généralisation des biocombustibles et à un modernisation des bâtiments axés sur les performances énergétiques, l'objectif d'une consommation nulle en hydrocarbures dans le secteur de l'habitat pourrait être rapidement atteint.
Concernant les transports, la commission pour l'indépendance pétrolière admet que plus de quinze ans seront nécessaires avant que les véhicules puissent se passer totalement d'essence et de diesel. Mais la mutation des automobiles est en bonne voie. Premier pays consommateur d'éthanol en Europe, la Suède est parvenue à en généraliser l'usage. La pluspart des bus de ville roulent au bioéthanol pur. L'E-5 (95% de pétrole, 5% d'éthanol) est l'agrocarburant le plus utilisé par les véhicules privés, mais déjà plusieurs centaines de milliers de voitures "flex-fuel" qui peuvent rouler avec l'E-85 (85% d'ethanol) sont en circulation. Les ventes de voitures "vertes" ne cessent d'augmenter, une politique d'encouragement favorisant là encore, cette conversion: parkings et péage urbain à l'entrée de Stockholm gratuis pour les véhicules moins polluants, exemption de taxes....
L'éthanol crée cependant une autre dépendance, puisque 80% carburant provient de la canne à sucre cultivés au Brésil, où les conditions de production intensive ont de lourdes conséquences sociales et environnementales. Se voulant un modèle de développement durable, la Suède mise sur son "or vert" autrement dit le bois des forêts qui couvrent plus de la moitié de son territoire pour produire de nouveaux agrocarburants plus rentables et respectueux de l'environnement.
Le biogaz issu de déchets organiques, actuellement expérimenté pour faire fonctionner un train, constitue également une piste majeure pour les besoins en énergie de l'industrie. Il permettrait aussi, à l'instar des autres énergies renouvelables (éolienne, solaire, marémotrice, etc..) de remplacer l'électricité d'origine nucléaire, avec laquelle le gouvernement veut rompre d'i'ci trente à quarante ans. Les investissements massifs dans la recherche-developpement sur ces ressources du futur sont donc au coeur du projet suédois. "Technologiquement optimiste", il s'appuie sur la mobilisation de tous les acteurs socio-économiques pour faire de la suède un laboratoire de premier plan.
Auteur: Nadège Figarol
Article à venir: sur les négawatts